Après la révolution, quel État ?

Il n’est pas possible de transformer la société sans briser l’appareil d’État de la bourgeoisie, c’est-à-dire sa police, son armée, sa justice. Karl Marx, après la Commune de Paris de 1871, comprit que le prolétariat ne pouvait utiliser l’appareil d’État existant car il était au service de la bourgeoisie, mais devait le détruire et le remplacer par le sien propre. Constatant que tous les États bourgeois, même les plus démocratiques, défendaient la dictature économique et sociale de la bourgeoisie, Marx donna à l’État fondé par la révolution prolétarienne le nom de « dictature du prolétariat ».

L’État actuel est surtout un appareil au service des possédants pour maintenir, par la violence, leur domination sur la masse des exploités. Même là où existent le parlementarisme et les libertés démocratiques, les piliers de l’État bourgeois sont l’armée et la police, qui interviennent quand les intérêts des possédants sont menacés.

Même si la majorité de la population décidait, par un vote, d’exproprier et de prendre sous son contrôle les groupes industriels et financiers, qui peut imaginer que ceux-ci l’accepteraient de bonne grâce ? Il sera donc nécessaire que le pouvoir ouvrier surgi dans la révolution s’organise en État pour empêcher la bourgeoisie de s’opposer à la transformation de la société.

Cette dictature du prolétariat - dictature contre les anciennes classes possédantes - sera par nature un État au service des classes exploitées, dont le fonctionnement sera le fait du plus grand nombre. Il sera donc radicalement différent et infiniment plus démocratique que tous ceux des anciennes classes exploiteuses. Avec le développement d’une économie planifiée à l’échelle mondiale, visant avant tout à satisfaire les besoins des hommes et des femmes, les différences de classes disparaîtront et, avec elles, les antagonismes de classes et la nécessité de tout appareil d’État. L’État ouvrier disparaîtra en s’éteignant progressivement.

Alors, pour reprendre l’expression d’Engels, « l’État aura désormais sa place au musée des antiquités, à côté du rouet et de la hache de bronze ».